Lorsque L’Obs m’a demandé si j’accepterais de faire une note de lecture sur le dernier livre d’Emmanuel Todd, j’ai d’abord hésité. Qu’est-ce qu’une chercheuse – dont le domaine de compétence est par définition restreint – peut dire sur un essai qui se donne pour but d’embrasser le monde comme il va ? Mais devant l’insistance répétée de Todd à se déclarer historien et anthropologue (et non pas essayiste), je me suis dit que s’il jouait la légitimité scientifique, on lui devait une réponse scientifique. Et même si la Russie et l’Ukraine ne sont pas au centre de son raisonnement, elles ne sont pas non plus à la périphérie, puisque le diagnostic qu’il pose sur ces deux pays fonde aussi son discours général sur la faillite des Etats-Unis, et plus globalement sur les failles occidentales.
Vous trouverez ma note de lecture sur le site de L’Obs . J’ai décidé d’en dire un peu plus ici et dans un fil Twitter. Pourquoi? Parce que quand vous dites qu’un livre est bon, on vous demande rarement de le prouver. Mais quand vous dites qu’il est mauvais, on exige des preuves détaillées. Ma critique se limite strictement à son analyse de la Russie et de l’Ukraine, car c’est sur ces deux pays que j’ai une compétence de chercheuse.
De manière générale, pour un auteur qui se dit anthropologue, historien, qui ne cesse de souligner son « tempérament scientifique » (p.33) et de prétendre présenter les résultats d’une recherche, le livre est d’une pauvreté affligeante en termes de sources et de méthodes. La première chose qui frappe est l’ignorance complète par l’auteur de recherches publiées sur le sujet qu’il aborde. Le chapitre Russie cite bien brièvement quelques livres sans en détailler le contenu (p.58-59), mais tous les ouvrages cités ont au moins un demi-siècle d’âge et datent probablement des lectures étudiantes de l’auteur. Leroy-Beaulieu (texte de 1881) a tout particulièrement les faveurs de l’auteur et fait l’objet d’une longue citation. Tout cela ne serait pas problématique si Todd utilisait aussi des travaux publiés depuis la chute de l’URSS. Vous en trouvez très exactement deux dans le chapitre consacré à la Russie: un papier de James Galbraith sur l’effet des sanctions (ok, pourquoi pas) , et UN livre : l’ouvrage de synthèse du géographe David Teurtrie « Russie, le retour de la puissance » qu’il cite au moins sept fois dans un seul chapitre. Je n’ai absolument rien contre ce livre, écrit par un chercheur et faisant donc partie du débat. C’est quand-même un peu juste au regard de l’énorme littérature produite en anthropologie, démographie, science politique et sociologie sur la Russie contemporaine, que ce soit en français, en anglais, en russe ou dans d’autres langues depuis la fin de l’URSS. Surtout quand on entend poser un diagnostic sur l’état du pays.
Todd ne souhaite pas s’encombrer de décennies de travaux basés sur des enquêtes poussées. A la place, il veut produire un travail original basé sur des statistiques. Soit; ce n’est pas illégitime. Mais le choix des indicateurs et les conclusions qu’il en tire interrogent: il ne sélectionne que des statistiques qui vont dans son sens, et en tire des conclusions infondées.
Todd mobilise quatre indicateurs : la mortalité infantile; le décès par alcoolisme; le taux d’homicides; le taux de suicide. L’ensemble de ces indicateurs vont dans le sens de sa démonstration. Oui, la mortalité infantile a fortement décru en Russie, et la comparaison avec les États Unis n’est pas à l’avantage des US. Oui, les taux d’alcoolisme et de suicide ont aussi diminué. Oui, le taux d’homicide est en baisse. Mais s’il s’agit de juger l’état d’une société, on pourrait opposer d’autres indicateurs à ces statistiques. En effet, si les homicides ont continuellement diminué (avant de monter d’ailleurs en 2022), le taux de crimes violents est en augmentation depuis 2017, selon les statistiques officielles. De même, l’alcoolisme a certes diminué en Russie, mais la consommation de drogue a augmenté, notamment chez les jeunes. Les estimations officielles parlent de +60% de narcodépendants chez les mineurs entre 2016 et 2021. Statistique contre statistique…
La sociologue que je suis bute aussi sur la corrélation établie par Todd entre mortalité infantile et niveau de corruption dans la société. « La mortalité infantile, écrit-il, parce qu’elle reflète l’état profond d’une société, est sans doute en elle-même un meilleur indicateur de la corruption réelle que ces indicateurs fabriqués selon on ne sait trop quels critères. » Ce qui l’amène à conclure à un plus haut niveau de corruption aux États-Unis qu’en Russie. Cette corrélation n’est jamais expliquée, et pour la prouver Todd donne les exemples japonais et scandinaves, pays caractérisés à la fois par une faible mortalité infantile et une faible corruption. Il est facile de le contredire par d’autres exemples de pays où la mortalité infantile est très basse pour un index de corruption plutôt élevé (Estonie, Slovénie, Monténégro). La corrélation ne tient pas la route, et aucune autre argumentation ne vient l’étayer. C’est quoi d’ailleurs la définition de cet « état profond d’une société », aurait-on envie de demander à l’anthropologue?
Un autre des indicateurs fétiches de Todd est le nombre d’ingénieurs formés: la comparaison des USA et de la Russie, à l’avantage net de cette dernière, devrait démontrer la force du modèle russe et expliquer sa « supériorité dans la guerre » (que je ne commenterai pas). Là aussi, l’épaisseur et la complexité du monde social échappe à Todd. Oui, la Russie forme beaucoup d’ingénieurs, et a sans doute un système d’accès à l’enseignement supérieur plus ouvert que les Etats-Unis. Cependant, il ignore certainement ce qu’est cette formation d’ingénieur dans le contexte russe, et les nombreuses critiques qui lui sont faites : archaïsme des programmes et déconnexion des défis contemporains, corruption dans la délivrance des diplômes, taux d’insertion très bas (20% au milieu des années 2010) des ingénieurs dans des postes correspondant à leurs métiers. Les ingénieurs français « vont se perdre dans la banque et l’ »ingénierie financière » » (p.50), déplore-t-il. Les ingénieurs russes aussi!
Mais ce sont surtout les conclusions à l’emporte-pièce tirées de toutes ces statistiques (dont la fabrication n’est questionnée que quand elles vont à l’encontre de ses conclusions) qui laissent pantois: ces indicateurs montreraient un état de « paix sociale de l’ère Poutine » (p.63), une société stable et consolidée. Vraiment? Je suis parmi ceux qui prennent au sérieux l’attractivité de la promesse de stabilité et de prospérité faite par le pouvoir poutinien à la population. Cependant, il ne faut pas confondre la promesse formulée par un régime et la réalité du terrain qui est, on s’en doute, différente et plus complexe.
Enfin, le diagnostic de la Russie dans la guerre est totalement déconnecté des données réelles. L’Etat russe aurait « choisi de faire une guerre lente pour économiser les hommes ». Il aurait donc mobilisé « avec parcimonie » (p. 66) pour les préserver. Cette affirmation ignore à la fois les chiffres réels des hommes mobilisés (officiellement plus de 600 000, et non 120 000 comme il l’affirme) et la réalité de l’usage des soldats sur le front: une masse humaine envoyée en première ligne sans formation ni préparation. Là aussi, le discours du pouvoir russe fait office de preuve intangible.
Si le chapitre portant sur la Russie propose une vision partielle et partiale du pays, celui consacré à l’Ukraine est effarant, tant il est pétri de mépris et de méconnaissance totale du terrain. Pour l’analyse de la Russie, Todd s’appuyait sur pas grand-chose. Pour l’analyse de l’Ukraine, il ne s’appuie sur rien, si l’on exclut le même livre de David Teurtrie (qui n’a jamais été un spécialiste de l’Ukraine) et un article portant sur un sujet pérpihérique à la démonstration (l’émigration juive partant de l’URSS). La source principale du chapitre est… Wikipedia dont il tire les cartes de la population et du vote aux présidentielles. Là aussi: la littérature académique sérieuse, y compris critique, portant sur l’Ukraine, est abondante. Mais manifestement, Todd pense pouvoir écrire une analyse nouvelle de ce pays à grands coups de clichés non sourcés et quelques statistiques. Le dénigrement de l’Ukraine est omniprésent dans le texte. Celle-ci est présentée comme un État failli: j’avais consacré un fil à ce sujet l’an dernier. La langue ukrainienne est qualifiée de « langue des paysans » (p. 96), alors que le russe serait « la langue de la haute culture » (p. 111). Todd ignore complètement la situation linguistique de l’Ukraine, son bilinguisme très particulier qui a certes des dimensions régionales, mais aussi urbaines/rurales, générationnelles, professionnelles… Il reproduit le cliché – que j’ai déconstruit à plusieurs reprises – d’une Ukraine divisée entre un Ouest ukrainophone et un Est russophone. Il trace à tort un signe d’équivalence entre « Ukraine de l’est » et « Ukraine russophone »; entre citoyens russophones et citoyens pro-russes.
La guerre dans le Donbass est étrangement absente de tout son raisonnement. Pour prouver l’absence de représentation politique de « l’Ukraine russophone » et la « fin de la démocratie ukrainienne » (p.97), il pointe le taux d’abstention élevé dans le Donbass lors des élections présidentielles en 2014. A aucun moment il ne lui vient à l’esprit que le Donbass connaît au moment de l’élection des actions armées de haute intensité sur son territoire et une fuite de la population pour éviter les combat, et que l’abstention peut y être liée. Bien d’autres dynamiques, notamment politiques et lingiustiques, sont liées à la guerre. Comment peut-on ignorer à ce point le contexte?
Le mépris de Todd est sélectif: ce qu’il reproche à l’Ukraine, il le pardonne à la Russie. Lorsque Todd évoque l’autorisation et l’usage commercial de la gestation pour autrui, cette donnée est pour lui un « signe de décomposition sociale » (p.72) de l’Ukraine, alors que le recours massif à la GPA commerciale en Russie ne lui pose manifestement aucun problème. Todd dénonce, de manière attendue, une « corruption qui atteignait des niveaux insensés » en Ukraine, oubliant de mentionner que la Russie était moins bien classée que l’Ukraine dans les classements de la perception de la corruption par Transparency International.
Voulant démontrer la domination d’Ukrainiens de l’ouest dans la classe politique ukrainienne, il produit une carte des lieux de naissance des élites politiques. La source est sans doute Wikipédia, mais ce n’est pas grave: Wikipédia peut être une bonne source quand elle n’est pas la seule. Cependant, sa démonstration tombe un peu à l’eau.« L’Ouest, l’Ukraine ultranationaliste, est surreprésenté au sein des élites politiques. L’Est et le Sud, l’Ukraine anomique, n’ont pour eux que les oligarques » (p.104). Ce n’est pas ce que sa propre carte montre. Ce que montrent les lieux de naissance des élites politiques, c’est par exemple que le président actuel Volodymyr Zelensky est originaire de l’Ukraine de l’Est. Que son prédécesseur, Petro Porochenko, est originaire de l’Ukraine du Sud et a fait une bonne partie de ses études à Odessa. Les deux présidents sont issus de milieux familiaux à préférence russophone. Aucune représentation de l’Est et du Sud dans les élites politiques, vraiment?
Je pourrais continuer et multiplier les exemples de méconnaissance, déformation, manipulation. Je m’arrête là. Cette note ne prétend pas à l’exhaustivité: elle rassemble juste suffisamment d’éléments pour pouvoir juger de la partie de son texte consacrée à la Russie et l’Ukraine. Je ne vais pas conclure en disant que l’auteur agit pour le solde d’une puissance étrangère; ce n’est pas mon rayon et je n’ai pas collecté d’éléments pour le prouver. Mais puisque Toddse dit chercheur, c’est sur ce terrain-là que porte ma lecture. Les chapitres consacrés à la Russie et à l’Ukraine ne respectent aucune norme de rigueur scientifique ou tout simplement de sérieux intellectuel. On y voit une ignorance complète de la recherche produite sur le sujet, des arrangements méthodologiques à la limite de la manipulation et des jugements de valeur manifestes. Les défauts de ces chapitres, on ne les pardonnerait pas à un étudiant de master. Je ne sais pas ce que cela implique pour le reste du livre, car ma compétence s’arrête là. Mais apparemment, ça n’empêche pas le bouquin de bien se vendre.
Anonyme a dit:
Excellente recension, merci
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Anonyme a dit:
Les essayistes sans scrupules, comme Emmanuel Todt, qui occupent continuellement les plateaux télévisés et sont courtisés par les chaines de désinformation, sont dangereux car ils véhiculent des visions idéologiques fort éloignées des analyses scientifiques d’un chercheur professionnel, obligé de rendre compte de ses sources. La décrédibilisation des universitaires en faveur de pseudo-gourous de l’analyse géopolitique est bien un signe de l’affaiblissement des démocraties et un triomphe de la propagande idéologique qui vise au bout du compte à les remplacer par des régimes autoritaires. M. Todt exprime tous les signes d’être un serviteur d’une puissance étrangère non démocratique, ou bien il s’agit d’un pauvre naïf malveillant.
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Anonyme a dit:
Excellente recension. Mille mercis pour ce travail salutaire et pour l’ensemble de vos analyses, toujours si éclairantes.
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Anonyme a dit:
Merci beaucoup, cela fait du bien de lire des critiques argumentées et accessibles face aux phénomènes de la foire médiatique et de l’édition pseudo scientifique. Ils ont eu raison de vous solliciter pour cet article. C’est un acte de résistance intellectuelle, de la connaissance et de la curiosité de comprendre. Cela n’a pas d’effet sur les convaincus mais peut faire douter quelques uns. D’autres, comme moi, pourront mieux, grâce à vous, défendre le sérieux intellectuel avec des éléments précis. Si seulement, les animateurs des plateaux télé et radios pouvaient être plus souvent plus critiques avec de tels arguments face aux vendeurs de papiers et d’illusions qu’ils reçoivent.
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Anonyme a dit:
Avec Todd on se croirait revenu au temps où des communistes comme Aragon présentaient le goulag comme l’une des plus belles inventions de l’homme en matière de rééducation.
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Anonyme a dit:
La supposition la moins désobligeante pour M. Todd est de le croire gâteux.
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Anonyme a dit:
Merci Madame pour votre analyse rigoureuse. Il se trouve que j’assistais hier AM à une conférence donnée à Nice par Alexandre Orlov, ancien ambassadeur de Russie en France, face à un parterre nombreux largement acquis à ses vues à l’exception de quelques contradicteurs dont j’étais. Sans surprise, il a déroulé le discours lavrovien type en appuyant son propos à plusieurs reprises sur le livre de Monsieur Todd, ouvrage dont il a dit qu’il aurait pu l’écrire tellement il reflétait ses vues et lui paraissait traduire la réalité !! C’est dire !
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Anonyme a dit:
Votre russophobie est à ce la mesure de votre commentaire, partial, partiel, totalement propagandiste.
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Anonyme a dit:
À défaut de pouvoir répondre à des arguments trop bien construits et sourcés, on traite son adversaire de raciste sans aucune raison, merci pour cette belle leçon de dialectique.
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Anonyme a dit:
en fait, le qualitatif « russophobe » colle assez bien à cette « chercheuse ». Il suffit de lire ces écris. C’est même probablement un compliment pour elle.
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Anonyme a dit:
À défaut d’être capable de répondre avec des arguments crédibles et sourcés, on traite son adversaire de raciste sans raison aucune. Merci pour cette belle leçon de dialectique.
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Anonyme a dit:
Vous avez raison, c’est partiel : Mme Lebedev aurait pu souligner que M Todd s’est bien gardé de parler du référendum ukrainien de 1991 où dans chaque région d’Ukraine 80% de la population MINIMUM a voté pour partir de l’URSS/Russie. Est compris. Seule la Crimée était entre 50 et 60% pour le départ. C’est proprement hallucinant que M Todd n’en ait pas parlé, mais c’est normal car cela mettrait à mal sa rhétorique.
Autre aberration lorsqu’il dit ne pas comprendre la « russophobie polonaise » et affirme qu’il n’y a aucune raison dans l’histoire qu’il l’explique. Il suffit de chercher un peu (massacre de Katyn notamment). Je vous aide : https://fr.wikipedia.org/wiki/Relations_entre_la_Pologne_et_la_Russie
Personnellement j’ai fini son livre cette semaine et je m’étais empêché de lire toute critique (positive ou négative, on trouve les deux) afin de me forger mon propre avis. J’ai embarqué un stylo pour prendre des notes et rechercher par moi-même des éléments.
Les réflexions sur la religion, l’éducation et la prospérité sont intéressantes, pour le reste c’est très décevant.
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Anonyme a dit:
Todd est un homme intelligent qui dérive depuis quelques années et se croit trop génial pour travailler sérieusement. Son livre sur le féminisme avait exactement les mêmes effarants défauts : il n’avait à peu près lu que Beauvoir et un livre de Butler, ainsi que la vulgate de l’air du temps qu’on trouve dans les magazines. Grâce à quoi il se baladait dans tous les médias en se prétendant « scientifique »… oui, peut-être, il y a bien longtemps. Gâtisme me paraît le mot adapté. Et en face, un manque total de respect des médias (mêmes considérés comme intellectuels) pour la vraie recherche. Merci à vous et à L’Obs!!!
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Anonyme a dit:
Ce n’était pas un livre sur le féminisme mais un livre sur les femmes. Nuance.
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Anonyme a dit:
Voilà M. Todd habillé pour ce qui reste de l’hiver. Preuve aussi que la rigueur scientifique s’accommode mal des idéologies. Bravo
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Olivier Simard-Casanova a dit:
Merci à vous pour cette analyse critique de l’ouvrage d’Emmanuel Todd. Votre article est (comme toujours) une lecture passionnante, argumenté avec soin et une évidente prudence épistémique.
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colinlebedev a dit:
Merci beaucoup !
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Anonyme a dit:
Toujours passionnant de te lire
Et tes analyses me permettent de prendre un peu de recul sur mon interprétation de ces sujets.Merci
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Anonyme a dit:
Merci pour ce travail d’analyse essentiel.
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Anonyme a dit:
Voilá! excellent, merci à vous de nous donner cet eclairage indispensable…Emmanuel Todd a fait une sorte de fake news au niveau du livre « scientifique », c’est vraiment regrettable…
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Anonyme a dit:
Merci Madame pour cette analyse solide et salutaire.
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Anonyme a dit:
Pour une scientifique comme vous, je me doute que pratiquer cet exercice de critique d’un livre écrit sans aucune méthode scientifique, est quelque chose d’à la fois chronophage et peu intéressant. Mais pour moi et d’autres non spécialiste, cela donne les clés de tout ce qui ne va pas dans ce livre et la méthode de Todd. Un très grand merci
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Anonyme a dit:
Excellent, bravo et merci pour ce travail salutaire de démystification.
Il est salubre de déboulonner les idoles, voire de démarquer les imposteurs qui vivent sur une réputation devenue injustifiée.
Comme vous le dite in fine, votre critique n’empêchera pas le livre de se vendre, mais enfin le lecteur aura au moins été informé au préalable du produit.
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Wallaby a dit:
>Les ingénieurs français « vont se perdre dans la banque et l’ »ingénierie financière » » (p.50), déplore-t-il. Les ingénieurs russes aussi !
Dans ce cas, comment expliquer le différentiel entre le taux d’industrialisation de la Russie (31,77% en 2021) et celui de la France (16.66% en 2021) : https://www.statista.com/statistics/271378/distribution-of-gross-domestic-product-gdp-across-economic-sectors-in-russia/ & https://www.statista.com/statistics/270352/distribution-of-gross-domestic-product-gdp-across-economic-sectors-in-france/
La Russie réussirait à faire fonctionner son industrie sans ingénieurs ?
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Anonyme a dit:
Merci pour ces liens! 16 % – c’est horrible.
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Anonyme a dit:
Merci pour ces liens! 16% – horrible!
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Anonyme a dit:
Cela fait un PIB industriel par habitant considérablement moindre qu’en France. Malgré l’importance des ressources naturelles disponibles sur le territoire russe et la désindustrialisation de la France.
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Wallaby a dit:
>[Todd] « pointe le taux d’abstention élevé dans le Donbass lors des élections présidentielles en 2014 ».
Non, Todd ne pointe pas « le taux d’abstention élevé dans le Donbass ». Pour prouver l’absence de représentation politique de l’Ukraine russophone, il pointe le taux d’absention élevé dans l’Ukraine russophone, c’est à dire dans les oblast du sud et de l’est entre Kharkhiv et Odessa, plus la transcarpathie (qui se distingue par la présence de la minorité hongroise ?). Le lecteur aura de lui-même mis entre parenthèses les oblasts de Donetsk et Lougansk affectés par la guerre. Les oblasts du sud et de l’est sans Donetsk et Lougansk suffisent à la démonstration de Todd.
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Wallaby a dit:
>Leroy-Beaulieu (texte de 1881) a tout particulièrement les faveurs de l’auteur et fait l’objet d’une longue citation. Tout cela ne serait pas problématique si Todd utilisait aussi des travaux publiés depuis la chute de l’URSS. Vous en trouvez très exactement deux dans le chapitre consacré à la Russie: un papier de James Galbraith sur l’effet des sanctions (ok, pourquoi pas) , et UN livre : l’ouvrage de synthèse du géographe David Teurtrie « Russie, le retour de la puissance » qu’il cite au moins sept fois dans un seul chapitre.
Sur le premier point, je crois qu’on peut rappeler que Todd se réclame de l’enseignement d’Emmanuel Le Roy Ladurie et du concept d’histoire de longue durée de l’école des Annales, qui se propose d’analyser les constantes et les évolutions longues d’une société sur lesquelles les régimes successifs, les révolutions, contre-révolutions ou effondrements comme celui de l’Union Soviétique, n’ont pas ou peu prise. Il n’est donc peut-être pas incongru, pour faire un instantané de la situation en Russie en 1881, d’utiliser un texte de cette époque.
Sur les références aux travaux publiés après la chute de l’URSS, en n’ayant lu que l’introduction et le premier chapitre, j’en trouve un troisième : Vladimir Shlapentokh. Je cite le chapitre 1 d’Emmanuel Todd :
« Shlapentokh (1926-2015) était né soviétique, et juif, à Kiev. Il fut l’un des fondateurs de la sociologie empirique en langue russe à l’époque brejnévienne. Son Freedom, Repression, and Private Property in Russia a été publié en 2013 aux Cambridge University Press. Quand on l’a lu, il devient facile de définir le régime de Poutine, non comme l’exercice du pouvoir d’un monstre extraterrestre subjuguant un peuple passif et demeuré, mais comme un phénomène compréhensible, qui s’inscrit dans la continuité d’une histoire générale de la Russie ».
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colinlebedev a dit:
Le nom est là. Aucune référence de travaux de Shlapentokh n’est mentionnée dans le livre.
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Wallaby a dit:
>C’est quoi d’ailleurs la définition de cet « état profond d’une société », aurait-on envie de demander à l’anthropologue?
Quand Emmanuel Todd prédit l’effondrement de l’URSS sur la base de la remontée du taux de mortalité infantile, et d’autres signes faibles (comme des livraisons de chaussures uniquement pour le pied droit https://fr.wikipedia.org/wiki/La_Chute_finale ), il n’est pas cru. Les autres pensent que l’URSS a peut-être quelques problèmes mais dans l’ensemble tient debout (c’est « globalement positif » comme dirait Georges Marchais).
Pourtant Emmanuel Todd avait raison. Ce que voit tout le monde, c’est l’état apparent, superficiel de l’URSS. Ce que voit Todd, c’est « l’état profond » de l’URSS.
C’est comme le sismologue en Islande qui analyse les profils de petits tremblements de terre inoffensifs et qui dit : le volcan est en train de se réveiller, et il faut évacuer la ville. Il était éteint depuis très longtemps, mais il y a déjà eu une éruption il y a 500 ans, et la prochaine va avoir lieu peut-être dans quelques semaines ou quelques mois. Les gens pensent : si on s’inquiétait dès qu’il y a une micro secousse sismique en Islande (ou au Japon) on ne pourrait pas vivre. Le sismologue, lui, il voit l’état profond du volcan en train de se réveiller.
Les chaussures pour le pied droit, c’est le micro-tremblement de terre qui annonce le réveil du volcan.
Donc maintenant qu’il voit le taux de mortalité infantile remonter aux États-Unis d’Amérique, il ne peut pas s’empêcher de dire : « les États-Unis vont s’effondrer ».
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Anonyme a dit:
Le travail de Todd est effectivement léger. La conclusion sur l’Ukraine n’en demeure pas moins la suivante : ce pays martyr est en voie de disparition, avec la moitié de sa surface agricole vendue à des fonds anglo-saxons, une classe politique complètement corrompue, entièrement soumise à l’OTAN et l’oligarchie qu’elle sert, sa reconstruction confiée à Blackrock, plus grand fonds de pension américain, une guerre très meurtrière perdue contre la Russie, une zone géographique sacrifiée à la guerre entre les USA et la Russie,… Funeste destin pour un pays qui, de gré ou de force (?), est tombé aux mains d’un Occident engagé dans une perte d’hégémonie mondiale belliqueuse. Pauvre Ukraine, pauvres ukrainiens…
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Anonyme a dit:
Mais bien sûr.
Le grand professeur Todd débite sa propagande poutininenne avec la rigueur d’un pilier de bistrot accoudé au zinc du café du commerce, mais il a raison quand même.
Allez Patron, remettez-nous ça.
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Jean-Daniel Chevalier a dit:
Le travail de Todd est effectivement léger. La conclusion sur l’Ukraine n’en demeure pas moins la suivante ; ce pays martyr est en voie de disparition, avec la moitié de sa surface agricole aux mains de fonds de pensions anglo-saxons, une classe politique complètement corrompue, entièrement soumise à l’OTAN et l’oligarchie qu’elle sert, sa reconstruction aux mains de Blackrock, plus gros fonds de pensions américains, une guerre très meurtrière perdue contre la Russie,… Funeste destin pour un pays qui, de gré ou de force ( ?), est tombé aux mains d’un Occident engagé dans une perte d’hégémonie mondiale belliqueuse. Pauvre Ukraine, pauvres Ukrainiens…
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Anonyme a dit:
Bravo Madame, et merci pour ce travail qui ouvrira les yeux de certains crédules peu exigeants. On a pu prendre un temps cet essayiste pour un auteur crédible voire sérieux, mais cette époque semble bel et bien révolue devant le choc épouvantable de la Réalité. Quelle déception nous avons subi! Le nouveau paradigme né le 24.II.2022 a déboulonné beaucoup d’idoles, et dissipé nombre de fantasmes. Continuons malgré tout comme vous à chercher la vérité!
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pascaldubellé a dit:
Merci pour ces précisions utiles au sujet du dernier livre d’Emmanuel Todd. J’hésitais à le lire, j’hésite un peu plus.
J’ai réagi sur mon site à ce que ce livre a suscité et à la présentation faite par l’auteur et les médias.
Je ne m’attache pas tant à l’analyse développée qu’à ce qui apparaît du déclin des sociétés occidentales auquel, d’ailleurs, j’associerai la Russie.
Comme chez les « Occidentaux », en effet, la société russe n’est plus structurée que par la fonction productrice et n’est donc pas plus stable qu’en « Occident ».
Le débat reste ouvert.
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Anonyme a dit:
Merci pour cette analyse que vous qualifiez de non exhaustive. Elle est cependant suffisamment complète pour mettre en lumière la paresse ou le parti pris de Todd…les deux peut-être.
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Anonyme a dit:
Bonjour,
vos critiques de Todd sont simplistes. Exemple votre réponse à l’argument tiré du taux de mortalité infantile qui est très très court….
Vous dénaturez une partie de ce qu’il écrit pour le critiquer comme par exemple le chiffre de 120 000 militaires engagés dont vous laissez à penser qu’il s’agirait selon lui du total d’engagés alors qu’il ne fait référence qu’aux engagés initialement dans le conflit…
Au-delà de vos critiques très partielles l’intérêt de son livre est de mettre en oeuvre des grilles d’analyse qu’il a conçues depuis ses débuts… Ce livre n’est as une thèse. Il ne comporte d’ailleurs aucune bibliographie.
Ses développements, fruits de cette mise en oeuvre audacieuse mais éclairante, fournissent des clés de compréhension de ce qui se passe dans le monde. Contrairement à ce que vous laissez penser ainsi que certains commentaires, il n’a pas de présupposés idéologiques. Il a des partis pris méthodologiques qui lui avaient quand même permis d’analyser à l’avance et de prévoir l’effondrement de l’URSS!
J’avoue que je préfère sa modestie et son humilité certes ternis par un tempérament combattif, à votre prétention de vous présenter en grande spécialiste dont les titres et la notoriété ne me semblent toutefois pas universellement reconnus….
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Anonyme a dit:
Merci Madame pour votre critique, qui est cependant elle-même n’est pas exempte de tout reproche.
Quelques exemples :
En ce qui concerne le nombre de soldats russes en Ukraine. M. Todd a indiqué que 120000 étaient entrés en Russie au début de la guerre et non mobilisés à ce jour. C’est qui est différent. Dans la phrase suivante du livre il indique bien que c’était une erreur et ce nombre n’était pas suffisant pour la conquête de l’Ukraine.
En ce qui concerne les quatre indicateurs : il prend des indicateurs d’importance pour montrer l’évolution globale de la société depuis les années 90. Il ne s’agit pas de comparer d’une année sur l’autre les autres indicateurs de moindre importantance (comme la consommation de la drogue ou les délits violents entre 2017 et aujourd’hui) qui reflètent peu ou mal les grandes lignes directrices de la société sur les 30 dernières années.
Il est pourtant évident, que M. Todd n’a pas de connaissances aussi précises que les vôtres sur l’Ukraine ou la Russie. Mais ceci n’enlève pas son mérite de bien démontrer les grandes tendances actuelles en Ukraine et en Russie.
Il démontre bien que l’Ukraine mène une guerre suicidaire. l’Ukraine est bel et bien un falied state. L’Ukraine, la république la plus prospère sous l’URSS, est devenue extrêmement pauvre et au moins aussi corrompue que la Russie. Un terrible constat s’impose : aujourd’hui la population des territoires sous contrôle de l’Ukraine représente environ la moitié à ce qu’avait l’Ukraine à l’indépendance. En 30 ans d’indépendance le pays n’a pas réussi à s’en sortit alors qu’il partait d’une position confortable comparée aux autres républiques de l’URSS. La population ukrainienne a bien tenté de renverser la tendance en faisant des révolutions en 2004 et 2014, mais a chaque fois failli sous le poids de l’oligarchie et de sa volonté insensée de choisir (coûte que coûte) entre l’Est et l’Ouest. Il est probable que la guerre contre la Russie constitue le dernier acte de bravoure de cette population ukrainienne, mais remporter la victoire paraît impossible. L’avenir de l’Ukraine, détruite et ayant perdu la moitié de sa population, est sombre et ce quelque soit l’issue de la guerre.
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Anonyme a dit:
c’est amusant de voir cette bonne vieille méthode de culpabilisation de la victime, de l’agressé, quitte à lui inventer des défauts et à inventer des prédictions sombres quant à son avenir :
* l’Ukraine aura perdu la moitié de sa population : où ? quand ? comment ? on se sait pas. Ce qui est sûr c’est que l’agression russe y contribue
* « la population des territoires sous contrôle de l’Ukraine représente environ la moitié à ce qu’avait l’Ukraine à l’indépendance » : pourriez-vous étayer votre théorie ? ou est-ce juste un mensonge de plus ?
* « L’Ukraine est devenue extrêmement pauvre » : des chiffres pour étayer ? des causes à donner ? Un rapport avec l’invasion russe, qui en profiter pour piller et voler ?
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Anonyme a dit:
Votre critique me paraît hors sujet
Je ne culpabilise personne, je ne fais que donner un constat de la réalité. Alors que vous êtes dans un registre moral et probablement dans un deni de la réalité.
J’ai bien dit que la guerre était suicidaire et que la chute de la population et la pauvreté sont une des conséquences de cette guerre suicidaire.
La guerre a en réalité amplifié la chute de la population, qui baissait déjà avant 2014 (et là difficile de blâmer la Russie). Pour la période après 2014 bien sur que la guerre a contribué énormement à la fuite de la population, baisse de naissances et la pauvreté.
Je n’ai pas inventé les défauts ukrainiens de la corruption, de la baisse de la population et de l’oligarchie. Ce sont des faits.
En ce qui concerne la population sous les territoires contrôlés par l’Ukraine actuellement.
Population en 1992 : 52 millions (source wikipedia)
En mai 2023, l’Institut ukrainien pour l’avenir a évalué à 29 millions le nombre d’habitants permanents en Ukraine (source TF1 https://www.tf1info.fr/international/ukraine-le-pays-ne-compte-t-il-plus-que-23-millions-d-habitants-contre-41-millions-avant-la-guerre-2271796.html). Donc 55% de la population de 1992 (la raison pour laquelle j’avais écrit « environ » la moitié de la population). Un mensonge selon vous ?
A cause de la guerre le PIB a chuté de 30% en 2022. Mais en réalité le pays est à moitié détruit, vit grâce à l’aide financière occidentale, avec environ la moitié de sa population et un nombre important des hommes tués ou blessés dans la guerre.
Quand on fait ce constat, a votre avis on peut faire des prévisions sombres ou radieuses de l’avenir du pays ? Vous pouvez nier la réalité, elle peut vous plaîre ou pas, mais elle s’imposera de toute façon.
Désormais sur le plan des responsabilités, puisque vous y tenez absolument.
On peut blâmer la Russie et avec raison. Peut être devrait on blâmer également l’Occident d’avoir tirer l’Ukraine sur lui en dépit des dangers évidents que cela représentait pour l’Ukraine (mais ça personne ne le dira en Occident, c’est toujours la faute aux autres).
Mais franchement, ne doit on pas poser la question centrale : est-ce que l’Ukraine n’a t-elle pas fait une erreur stratégique et tragique à vouloir absolument choisir entre l’Ouest ou l’Est ? Ne fallait il pas que le pays garde une neutralité comme la Finlande après la 2nde guerre mondiale ? La tragédie est qu’aucun dirigeant ukrainien n’a voulu choisir cette voie alternative, alors qu’elle était la plus sage et la plus profitable au pays. Quand on est voisin des deux blocs antagonistes, le plus intelligent était de ne pas choisir. Parce qu’au final il s’agit de l’avenir de l’Ukraine, non de l’Occident ou de la Russie.
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Anonyme a dit:
Cette critique manque totalement le sujet du livre qui n’est pas la Russie ou l’Ukraine, mais l’occident et plus précisément les USA. C’est de cela essentiellement dont le livre parle, et du néolibéralisme en détruisant l’industrie a également détruit sa capacité à produire des armes en quantité suffisantes et à mener des conflits d’intensité.
Les descriptions de la Russie et de l’Ukraine s’arrêtent page 138 et dès le chapitre 4 il n’est plus question que de l’occident que Todd voit dans un état de nihilisme avancé – dans le sens du terme lorsqu’il fut appliqué à l’Allemagne nazie – tout en disant d’ailleurs de manière assez fréquente que la Russie souffre exactement des mêmes symptômes toutefois à un stade moins avancé.
Et c’est essentiellement l’axe de cette critique: Les sources que Todd a prise vont dans le sens de sa démonstration (mais quelle surprise … ) mais il existe d’autres sources (là encore, mais quelle surprise …) Transparency international appelé à la rescousse pour montrer que selon l’échelle occidentale l’occident c’est quand même moins corrompu – ça ne convainc que les anciens converti.
Ce que le livre analyse, c’est la pulsion violente des USA qui les poussent à aggraver tous les conflits sur la planète. Et de fait, ils y sont impliqués dans tous, et l’épisode Gaza indique sans l’ombre d’un doute que effectivement plutôt que de tenter de calmer les choses ils vont vers la surenchère. C’est une réflexion bien plus profonde que de commenter le fait que les ingénieurs formés vont vers les boulots les mieux payés qui à l’heure actuelle sont effectivement dans la banque ou la finance – et dont j’ai vraiment du mal à y voir une spécificité Russe.
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Anonyme a dit:
Merci pour cette critique scientifique de son travail !
Pour moi, E.Todd, c’était un réformiste dit « de gauche » connu pour le sérieux de ses bouquins qu’il avait écrit il y a quelques années au sujet de l’économie française et de la nécessité d’une meilleure redistribution.
Je dois même avoir un .PDF de lui qui traîne par là, même si, moi, le réformisme… ça ne me parle pas beaucoup étant donné que je suis un militant libertaire ( un vrai, hein, surtout pas comme Michel Onfray ! ).
…Enfin bref, vlà que je tombe sur une vidéo avec Todd comme invité ( sur une chaîne qui m’est proposée par youtube ) et au bout de quelques minutes, je me dis… Pff ça pue complètement le mépris de l’Ukraine et la glorification de la Russie de Poutine… Mais il est sérieux là ?
Et là, heureusement, après une petite recherche, je tombe sur votre papier.
Je ne dois pas être le seul à avoir froncé les sourcils en se demandant quoi penser donc merci d’avoir pris le temps d’apporter votre critique, d’autant que vous n’avez pas spécialement dû passer du bon temps à lire ça.
Pour ses afficionados incurables, être « lucide » sur les positions occidentales est une chose, admettre la présence d’un nazionalisme exacerbé en Ukraine aussi, mais fermer les yeux ou éluder à demi-mots les horreurs perpétrées par la Russie, son impérialisme propre, l’existence d’un peuple ukrainien aux idéaux politiques multiples dont des civil(e)s sont bien les victimes innocentes d’une guerre, avec ses crimes de guerres et leur tendance génocidaire, voulue par un despote… Non mais sérieux ?
J’ai déjà entendu ce genre de positions pro-Poutine et anti-Ukrainienne dans les milieux gôchistes anti-atlantistes par chez moi, au nom de l’anti-impérialisme ( américain seulement, évidemment )… C’est écœurant.
Le côté « impérialisme comme dernier stade du capitalisme » pour reprendre Lénine, admettons, les assassins des purges du communisme de guerre soviétique ne sont pas spécialement mes auteurs favoris, eux non plus, mais je veux bien poser un œil critique sur ce qu’ils avaient à dire, voire même méditer un instant les choses qui peuvent me sembler un minimum pertinent dans leur discours… Ce n’est pas pour autant que ça changera ma vision sur leurs crimes, et, sans que ça n’ait vraiment d’impact sur mon appréciation des habitants d’Ukraine ou de Russie par ailleurs, je resterai évidemment davantage Makhno que Trotsky.
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Anonyme a dit:
>Je ne vais pas conclure en disant que l’auteur agit pour le solde d’une puissance étrangère;
…
Vous le laissez entendre, pourtant, par cette prétérition – sinon, vous ne l’auriez pas formulée.
Si vous avez des preuves, des indices… il serait de l’intérêt de la communauté scientifique de le savoir, nous sommes, après tout, dans un pays libre.
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Marion a dit:
En somme E Todd , un Didier Raoult de la science épidémiologique… Fausse donnée,fausses études, fausses conclusion…. Heureusement ( comme le dit Bruno Latour le droit d’enquêter) désigne les imposteurs : Todd ,Macron , Cahujac, Canfin, Melanchon, alors que le propre du Foutriquet est de glorifier ses propres contradictions sans les assumer ( car nous en avons tous) et l’homme paresiastiques lui assumera ses contradictions en payant le prix de ses choix et non en mesurant soit disant les conséquences de ses actes. Yannick philosophe
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Anonyme a dit:
Merci beaucoup pour ce commentaire éclairant !
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Anonyme a dit:
Merci Madame, j’ai beaucoup aimé lire votre note. Alors même que je trouve la pensée d’Emmanuel Todd pertinente, et que je continue à le suivre avec beaucoup d’intérêt.
Vos commentaires sont argumentés, mesurés, posent de vraies questions sur la méthode utilisée par l’auteur dans certains passages, pointent pour le moins un certain manque de rigueur.
Cela donne envie de vous lire plus souvent.
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Anonyme a dit:
Prendre pour exemple de l’élite ukrainienne le président Zelenski est plutôt osé, lui qui avant son élection n’était qu’un « comique » de plateaux télés…
Quant à l’état de décomposition de la société ukrainienne avant la guerre il suffit, et Todd ainsi que tous les autres démographes le soulignent, de penser aux près de 10 millions d’Ukrainiens qui ont quitté leur pays entre 1992 et 2014…
Bref, cette recension critique expéditive me paraît assez faible et peu argumentée elle aussi…
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Anonyme a dit:
Ca fait longtemps que Todd est passé du côté obscur de la force !
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Anonyme a dit:
madame, vous et vos collègues sociologues politologues êtes d’un amateurisme stupéfiant!! Je me demande comment font les preneurs de décision politique français pour avoir des analyses de la Russie basées sur la réalité (que les chercheurs comme vous sont sensés leur fournir). Je regarde votre intervention d’hier 07.03.2024 sur la RTS (Radio Television Suisse) qui pendant 10min n’est remplie que de clichés idéologiques et démagogiques (ex. « les russes trouvent des moyens d’échapper aux interdits », « les russes sont contre Putin mais ne le disent pas », etc). A quoi bon faire des recherches pour avancer de telles hypothèses « de bistrot ».
En fait, meme si vous êtes née en Russie vous la méconnaissez profondément ou pire encore connaissez uniquement la partie qui vous convient à travers le prisme du modèle occidental actuel, ce qui n’est pas forcément le modèle de la société russe (ni chinoise, ni indienne, ni même africaine)
incroyable à quel bas niveau est tombé la recherche française en sociologie (après avoir liquidé la profession de journaliste, c’est deja le cas des sociologues et probablement philosophes). Décadence!!
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Anonyme a dit:
L’ouvrage d’Emmanuel Todd, « La défaite de l’Occident », semble devoir être lu, en effet, plus comme un essai que comme une étude scientifique. C’est du reste ce qui rend sa lecture agréable et intéressante, car le livre exprime un point de vue, celui de l’auteur, qui bien sûr s’appuie sur des chiffres et des statistiques, mais qui ne prétend, à aucun moment, ni détenir la vérité absolue, ni pouvoir prédire l’avenir. On ne voit pas pourquoi un intellectuel, ayant à la fois la formation et l’expérience de plusieurs disciplines – l’économie, la démographie – ainsi qu’une connaissance personnelle du monde anglo-saxon , ne pourrait librement s’exprimer, et donner son avis, avec la bonne foi, la spontanéité, l’humour et la modestie qui caractérisent Emmanuel Todd.
Les critiques d’Anna Colin Lebedev tournent en réalité autour d’un seul reproche qui se résume à la méconnaissance du sujet par Emmanuel Todd, et à l’insuffisance des sources auxquelles il a recours. C’est, de la part d’Anna Colin, présupposer qu’il existerait une vérité scientifique en la matière, et que les idées politiques, la sociologie ou la géopolitique constitueraient des sciences exactes. Cette vision des choses n’est pas sans rappeler ce qui s’est produit avec le marxisme, avec le matérialisme historique, présenté comme une science, avec les conséquences que l’on connaît et qui ont été décrites dans le « Passé d’une illusion de François Furet ».
Les ouvrages les plus remarquables publiés dans le domaine des sciences politiques ne se présentent jamais comme l’analyse de faits quantifiés par des statistiques dont il faudrait d’ailleurs également présupposer la parfaite exactitude. Tous ces chiffres et toutes ces données étaient d’ailleurs inexistantes, lorsque Tocqueville a écrit « La démocratie en Amérique », et Anatole Leroy-Beaulieu « L’empire des tsars et les Russes ». L’absence de données chiffrées ne diminue en rien la valeur des observations alors faites par ces auteurs. A l’inverse, le marxisme prétendument scientifique n’a nullement permis de prévoir la chute de l’URSS en 1991!
Dans sa critique prétendument scientifique, Anna Colin Lebedev fait elle-même preuve de certains préjugés sur la « démocratie » occidentale, et reproche sans le moindre fondement à Emmanuel Todd son mépris pour l’Ukraine. Todd peut bien sûr se tromper dans ses appréciations, mais on ne sent aucun mépris dans ses commentaires. Ce reproche d’un prétendu mépris à l’égard de la culture ou de la langue ukrainienne fait lui-même parti des lieux communs utilisés par les nationalistes ukrainiens. Ce même reproche avait été fait, dans les années 1920, par un historien et homme politique ukrainien – Dorochenko – au linguiste russe Nicolas Troubetzjoy, dans la polémique qui avait suivi la parution d’un article de Troubetzkoy sur la question ukrainienne.
Anna Colin Lebedev qui critique le cliché consistant à distinguer, de façon caricaturale, l’Ukraine de l’Ouest de l’Ukraine de l’Est, n’est pas fondée à faire ce reproche à Emmanuel Todd qui analyse le résultat des scrutins non pas dans l’Ouest et l’Est de l’Ukraine, mais dans différentes régions. Elle-même passe sous silence le fait que l’Ukraine n’est pas, dans la réalité, un pays unitaire. Le territoire de cet Etat qui n’existe que depuis 1917 a plusieurs fois changé, il a été fait d’adjonctions successives, et surtout, sa population n’est nullement homogène.
Mais surtout, les critiques adressées à Emmanuel Todd perdent totalement de vue que l’ouvrage de Todd ne concerne pas principalement ni la Russie, ni l’Ukraine, mais qu’il comporte essentiellement une critique de la décadence ou de la chute occidentale, et une dénonciation du nihilisme dominant à présent la société occidentale.
Le succès de l’ouvrage d’Emmanuel Todd tient précisément au fait que le lecteur ne se voit pas asséner des « vérités scientifiques », et qu’il peut librement poursuivre sa réflexion sur l’évolution du monde et de la société.
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Anonyme a dit:
Toute critique argumentée est utile. Encore plus lorsqu’elle est honnête. Concernant la GPA en Russie, vous auriez ainsi pu utilement préciser que — contrairement à l’Ukraine — elle a été interdite aux étrangers. Ce qui limite quand même la portée du commerce…
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Anonyme a dit:
Merci énormément pour cet article très éclairant!
Je découvre ce site un peu par hasard, et en tant que Francais vivant en Slovaquie, je suis intéressé d’en apprendre plus sur les ambitions de la Russie en ce qui concerne son appétit pour les territoires voisins.
A écouter Todd, la Russie ne s’intéresserait qu’aux territoires du Donbass et n’aurait ni la capacité ni l’intérêt de gratter plus loin, la population n’étant pas majoritairement pro-russe ou russophones…
J’ai l’impression qu’au contraire, la Moldavie, les pays au sud-est de la Russie et les pays balkans auraient toutes les raisons de se sentir menacés.
Dans votre article, vous dites:
« Il reproduit le cliché – que j’ai déconstruit à plusieurs reprises – d’une Ukraine divisée entre un Ouest ukrainophone et un Est russophone. »
Pourriez-vous me pointer vers quelques articles que vous auriez écrit à ce sujet? J’aimerais en savoir plus.
Merci encore
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Anonyme a dit:
Bonjour, un article pour l’Obs. avant même de lire vos commentaires, je savais de quel coté vous seriez. Il est évident qu’un journal comme l’Obs va choisir quelqu’un qui sera dans son sens politique. Loin de moi d’être d’accord avec tout ce que dit E. Todd , j’avoue avoir parfois du mal à suivre certains de ses raisonnements, mais vous, vous êtes à charge constamment, dans la bien-pensance actuelle, pensée monolithique, qui règne en France dans pratiquement tous les Médias. Cela en est extrêmement caricatural et dérangeant car il n’y a aucun vrai débat. Quand je dis tous les Médias, je vais étayer: je suis certain à 100% que si vous faites commenter ce livre dans une émission sur la 5 , sur France Info, sur Arte (que j’aime bien) en gros toutes les émissions de chaines publiques , et bien on arrivera à la même orientation que la votre. La seule chaine sur laquelle on pourrait peut-être avoir un débat ouvert et démocratique est une chaine justement à laquelle on reproche son manque d’ouverture, un comble! Pour conclure, si l’Occident va vers la défaite, il n’a pas besoin de la Russie pour cela et contrairement à ce que dit Todd, il n’a pas besoin des US non plus, il y arrive bien tout seul.
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